Hélias n’a pas eu une enfance difficile, humain ou monstre il est des choses qui restent toujours les mêmes et dans une famille avec un héritage aussi présent que la sienne, tout était fait pour que chacun reste à sa place. Pendant des centaines d’années, les seconds fils des Rois humains ont toujours été éduqués selon une même règle, ils étaient les conseillers, les prêtres, les intellectuels… tout en ayant une certaine révulsion pour les responsabilités trop poussées, ils devaient être utiles sans chercher à s’élever plus haut, devaient attachés à leur quotidien pour ne jamais chercher à se battre –cela était réservé aux suivants, on n’était jamais sûr que l’ainé atteigne la majorité, les autres pouvaient bien aller se tuer à la guerre, mais il fallait garder celui-là au chaud. Évidemment, jeune on ne comprend pas tout ça, on ne se rend pas compte du fait que les parents font tout pour créer des liens et puis de toute façon on est bien content d’être avec l’ainé. Dans une fratrie l’ainé c’est un peu le modèle, celui qui apprend tout en premier, celui qui explique les règles des jeux, le plus mature également, à partir de là deux réactions sont envisageables, la jalousie ou l’admiration. Hélias était du deuxième type. Avec le temps tout ça s’était tassé bien évidement, il est de toute façon plus simple d’être admiratif à sept ans, un avion en papier qui vole à plus de deux mètres et vous avez un nouvel héros ! Ne reste des jeunes années que cette affection sans limites, quand grandi proches, on a tendance à passer tous les défauts sous silence, la vie est forcément à deux. Tout comme il n’a jamais songé à questionner sa vie, tout ayant été tracé pour lui depuis des générations, des centaines d’années d’expérience avaient décidé de sa vie bien avant qu’il ne voit le jour et, se laissant porter par cette idée rassurante, il ne s’était jamais surpris à remettre en question sa condition. En famille c’était la même chose, pourquoi changer quand ce qu’on a déjà est si confortable ? Seul un fou y songerait et fou, Hélias ne l’était pas.

Il serait également faux de penser qu’il était idiot, suivant toutes les exigences sans se poser de questions, il était simplement pragmatique. Les choses vont toujours mieux quand elles suivent le plan, chercher plus loin serait comme réparer quelque chose qui fonctionne correctement, une perte de temps et surtout un risque de tout casser. La prudence, l’intelligence et tous les mots positifs finissant en « ence » le confortaient dans l’idée d’occuper la place qui lui était dévolue. Ainsi, alors que son frère ainé se préparait à de plus hautes responsabilité, il s’orientait vers l’éducation, poussant ainsi la tradition et la caricature jusqu’à son paroxysme. Pourtant, il aimait bien son travail, tout humain qu’il semblait être, il restait un être manipulateur par essence, être en capacité d’influencer à ce point le devenir de ces âmes avait quelque de si satisfaisant qu’il ne s’imaginait à vrai dire pas réaliser un autre travail.

Souvent associé à son ainé en raison de leurs nombreuses convergences d’opinion, il se considère cependant très différent de lui, là où Thais a un besoin presque maladif de protéger tout le monde, Hélias ne s’intéresse qu’aux intérêts de sa famille, il n’est pas un gardien et ne le sera jamais. Derrière son masque de pragmatisme et de calme se cache en effet un monstre calculateur qui n’hésitera pas à sacrifier quelques pions pour ses fins, toujours dans l’intérêt de Thais, bien évidement.